Revue de presse
Publié le 19 février 2015

PARIS BRÛLE POUR METRO

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L’arrivée annoncée du quotidien gratuit Metro dans la capitale ne laisse pas les éditeurs de presse payante indifférents. Les projets de riposte se multiplient.

Nous travaillons sur plusieurs villes françaises, mais Paris est actuellement le dossier le plus avancé.»Jean-Michel Arnaud, le représentant en France du groupe de presse suédois Metro International, n’en dira pas plus sur son projet de quotidien gratuit à Paris. À la mairie de Paris, on reconnaît la réalité de contacts informels et le dépôt d’une demande d’autorisation relative à la distribution sur le domaine public. Elle concerne essentiellement des boîtes fixes placées à proximité des bouches de métro. Car l’accès à l’intérieur des stations – après une compétition à laquelle participait déjà le groupe scandinave – a été en effet concédé en 1999 à l’hebdomadaire gratuitÀ nous Paris, filiale de Métrobus (Publicis), pour une période minimale de sept ans. Le dossierMetro, qui ne soulève pas a priori d’obstacles juridiques, est entre les mains du service des concessions de la ville, mais ne figure pas à l’ordre du jour des prochains conseils municipaux. La date de lancement, susceptible de mobiliser la concurrence, est gardée jalousement secrète.

La publicité assurera 100% des revenus

Une chose est sûre:Metromaîtrise parfaitement l’exercice. La filiale de Modern Times Group, née d’un petit gratuit lancé en 1995 à Stockholm, décline aujourd’hui sa formule dans onze pays et une douzaine de villes, de Prague à Philadelphie en passant par Santiago du Chili, Rome ou Toronto au Canada. Son concurrent norvégien, le groupe Schipsted, éditeur de20Minutes, est également réputé nourrir des ambitions de développement sur la capitale française. Il est aisé de savoir à quoi la déclinaison parisienne pourrait s’apparenter: les différentsMetrose ressemblent tous. Forts d’une trentaine de pages au départ, ces titres généralistes et politiquement neutres proposent chaque matin aux citadins l’actualité nationale et internationale, souvent bâties à partir de dépêches d’agence. Ils offrent également des informations originales élaborées par une rédaction propre, des informations sur les célébrités, des pages loisirs… et de la publicité, laquelle assure 100% des revenus. Le concept fait mouche, notamment auprès des 20 à 35ans, fragilisant au passage la presse locale payante. Le quotidien gratuitStokholm News, propriété du groupe de presse De Telegraaf qui espérait bien faire de l’ombre àMetrodans son berceau historique, a cessé sa parution le 29décembre, étouffé sous les pertes.«En France,Metrodispose,me semble-t-il,d’une chance réelle,affirme Luciano Bosio, directeur général adjoint de Carat Expert.La presse quotidienne n’est globalement pas très performante sur la cible jeunes à Paris. Il existe un immense océan de lecteurs potentiels, pas tellement CSP+, mais jeunes cadres, cadres moyens ou étudiants.»Avec 40% seulement de lecteurs de quotidiens, l’Île-de-France est aujourd’hui la région où on lit le moins après la Normandie.

Une menace prise au sérieux

Les éditeurs prennent la menace très au sérieux. Le nouveau propriétaire deFrance Soir, le groupe italien Poligrafici Editoriale, vient d’annoncer son intention de lancer un quotidien parisien«qui devra devancer la parution deMetro». Directement attaqué, le groupe de presse Amaury, éditeur duParisienet deL’Équipe, a lui aussi pris des mesures.«Autant le lancement de l’hebdomadaireÀ nous Parisnous a laissés relativement indifférents,reconnaît Jacques Guérin, directeur général duParisien,autant nous suivons avec beaucoup de vigilance les projets deMetro.Le leader de l’information sur l’Île-de-France saura faire face et réagir.»Ira-t-il jusqu’à lancer son propre journal gratuit, à l’exemple duMirrorbritannique? Son lectorat est relativement proche de la cible habituelle deMetroet un lecteur sur trois est âgé de 20 à 35ans. En pleine négociation avec Les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) pour distribuer son titre par lui-même, le groupe Amaury pourrait s’appuyer sur son infrastructure dans la capitale pour contre-attaquer. PourLe Parisien,le risque se situe surtout sur le terrain de la publicité locale.«Le succès publicitaire d’À nous Parisen témoigne: si le titre trouve son public, il intéressera des marques désireuses d’effectuer des surpressions à Paris»,affirme Luciano Bosio.

Des acteurs optimistes

Pour autant, les acteurs présents sur le marché se veulent optimistes.«Sur le plan publicitaire,Metrose positionne d’abord sur le marché local alors que nous faisons la majorité de notre chiffre d’affaires avec des annonceurs nationaux», constate Michel Lallemant, patron d’À nous Paris,qui se repose sur son mode de distribution, incontestable atout auprès des annonceurs.«Nous savons précisément à qui nous diffusons le journal. Dans la rue, on ne sait pas quelle est la typologie du lecteur.»L’empoignade parisienne promet d’être chaude.

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