Malgré un succès d’audience, les journaux gratuits peinent à trouver l’équilibre alors que le marché publicitaire marque le pas. Pour résister à la crise, le secteur pourrait se concentrer.
La crise impacte sérieusement le modèle économique des quotidiens gratuits d’information. De fait, Metro International sera en perte en 2008 et le norvégien Schibsted, éditeur du quotidien gratuit « 20 Minutes », vient d’annoncer des résultats décevants au troisième trimestre. Touché de plein fouet par le recul des investissements publicitaires, sa seule source de revenus, le secteur pourrait choisir de se concentrer pour résister. Pourtant, avec 4,2 millions de lecteurs chaque jour en France, les journaux gratuits rencontrent un véritable succès en termes d’audience.
Mais la fin de l’année s’annonce particulièrement dure. Les dernières prévisions de France Pub (groupe Hersant Média) tablent sur un recul de 3 % des recettes publicitaires de la presse gratuite. « Le marché publicitaire est pire que ce que nous avions prévu. La crise actuelle nous touche de plein fouet », reconnaît le président du conseil d’administration de Metro France, Jean-Michel Arnaud.
« un titre de trop »
Le manque à gagner sera difficile à combler. « Aujourd’hui, la presse gratuite d’information n’est pas une activité rentable, analyse Jean-Christophe Thiéry, directeur général de Bolloré Média. Un seul groupe est à l’équilibre, et les autres perdent de l’argent. » Arrivés sur le marché des gratuits en 2006 et 2007, les quotidiens du groupe (« Direct Soir » et « Direct Matin Plus ») devraient afficher des pertes d’environ 25 millions d’euros pour l’exercice 2008, et parvenir à l’équilibre d’ici à 2013. « Si l’arrivée de Direct Matin en 2007 n’a pas eu d’impact sur notre audience, elle a entamé le gâteau des recettes publicitaires », reconnaît Jean-Michel Arnaud.
Pour beaucoup, la concentration du secteur semble inévitable. « En presse gratuite, il y a un titre de trop », affirme Pierre-Jean Bozo, président de « 20 Minutes ». Selon nos informations, TF1, actionnaire minoritaire de « Metro », aurait d’ailleurs approché le groupe Schibsted en vue d’une fusion avec « 20 Minutes », mais sans suite. Si chez « Metro », on affirme qu’une opération de rapprochement « n’est absolument pas à l’ordre du jour », le président de « 20 Minutes » ne s’interdit rien?: « Avec notre positionnement de leader, nous regardons toutes les opportunités de croissance externe et de concentration. » De son côté, le groupe Bolloré ne compte pas céder sa place sur le marché : « Nous sommes un groupe persévérant », explique Jean-Christophe Thiéry. Selon Jean-Clément Texier, expert médias et président de Ringier France, « les journaux gratuits en France sont adossés à des actionnaires solides. Schibsted (« 20 Minutes »), Metro International et le groupe Bolloré ont tous les trois les moyens de tenir. Ce qui fera la différence, c’est leur volonté de maintenir leur marque sur le marché ».