Publié le 01/12/2015
Pouvoirs locaux et entrepreneurs n’ont pas attendu la COP21 pour s’engager en faveur du climat. Ils agissent à leur niveau, depuis des années.
Signé en 1997, le Protocole de Kyoto n’est entré en vigueur qu’en 2005. La 15e conférence des parties, qui se tenait à Copenhague en 2009, s’est soldée par un échec. Les conférences sur le climat se multiplient depuis 2011… sans succès. Les grandes institutions avancent à pas lents quand les pouvoirs locaux ont déjà en dépassé le stade des discours.
Mobilisation des collectivités locales
Les exemples abondent : reconversion réussie de la fosse minière 11-19 de Loos-en-Gohelle (Pas-de-Calais) en centrale solaire expérimentale ; construction d’un parc éolien 100% citoyen à Bégane dans le Morbihan ; mise en place de certificats d’économie d’énergie dans l’agglomération du Grand Nancy ; installation de capteurs par la région Poitou-Charentes pour informer les agriculteurs des conséquences sur leurs cultures du changement climatique, ou encore la pose de 30.000 m² de récifs dans la baie marseillaise pour développer la biodiversité dans le cadre de l’opération « Récifs Prado ».
Engagement des entreprises
A ces initiatives, s’ajoutent des milliers de start-up et d’entreprises traditionnelles qui, bien intégrées dans leur territoire, inventent ou se réinventent souvent avec l’aide des pouvoirs publics locaux. Ainsi Roquette Frères, groupe familial français spécialisé dans la production de produits dérivés de végétaux, qui pour la première fois au monde, a installé en 2011 une chaudière à bois sur son site de Beinheim dans le Bas-Rhin pour l’extraction de l’amidon. Le Moulin d’Auguste, meunerie fondée en 1887 aux Andelys dans l’Eure, a quant à lui associé artisanat et développement durable en jouant la carte de la proximité.
90% des approvisionnements proviennent d’exploitations dans un rayon de quarante kilomètres. Les distances de livraison ont été limitées à cent cinquante kilomètres. Des entreprises qui peuvent compter sur le soutien d’investisseurs institutionnels, comme le Crédit Agricole ou la Caisse des Dépôts, qui s’orientent vers des activités faiblement émettrices.
Enjeu global, réponses locales
D’où vient cette vitalité ? Sans doute de la nature du défi écologique qui consiste à adapter les activités humaines à un territoire particulier. Les données du problème ne sont pas les mêmes que l’on habite New York, Perpignan ou le sud du Bangladesh. À enjeu global, réponse locale ou décentralisée. L’impulsion privée ou publique change de nature : de descendante et verticale, elle devient ascendante et horizontale.
De surcroît, par leur taille et la variété des acteurs qui s’y trouvent – administration, entreprises, universités –, les collectivités offrent un terreau idéal à l’expérimentation. Elles s’apparentent à des concentrés de sociétés humaines où il est possible de tester grandeur nature de nouveaux modes de transport, de production ou de distribution avant une éventuelle extension.
La lutte contre le changement climatique agit comme un révélateur de la capacité de transformation du pouvoir local. Peut-être est-ce là que réside le vrai ferment d’optimisme pour l’avenir : notre vieux pays centralisé redécouvre l’initiative locale et avec elle, une manière différente d’appréhender l’action publique. Moins rigide, moins uniforme, en un mot, moins idéologique. Point de « grand soir », mais de petites révolutions faites à l’amiable.
Jean-Michel Arnaud, président de Domaines Publics et directeur des publications de l’Abécédaire des Institutions