Publié le 08/04/2016

C’est cette inégalité que la loi dite A.N.I. (Accord National Interprofessionnel) de 2013 compte résorber en obligeant les entreprises, quelle que soit leur taille, à proposer un contrat collectif à leurs salariés. Bien que louable, cet effort d’uniformisation doit être nuancé. D’abord, un grand nombre de salariés disposent déjà d’un contrat individuel. Ensuite, en raison d’un contexte économique difficile, les petites entreprises risquent d’en retarder la mise en place ou d’en réduire le coût par une baisse des prestations. Enfin la loi n’oblige pas à couvrir les ayants-droits. Les salariés qui voudront maintenir le niveau de leur couverture devront souscrire des assurances complémentaires. Par ailleurs, de fortes disparités existent entre les obligations qui pèsent sur les entreprises et sur les collectivités publiques. Selon une étude réalisée en 2014 par GMW Conseil, 58% des collectivités participaient au volet prévoyance de leurs agents ; 41% au volet santé. Parallèlement, d’après un sondage réalisé par le groupe Moniteur début 2014, 41% des agents publics déclaraient s’être privés de soins durant les douze derniers mois ; 40% d’entre eux y avaient même renoncé au moins trois fois.
À ces inégalités entre actifs, s’ajoutent celles entre actifs et inactifs. Douze millions de seniors ont besoin d’une complémentaire santé. Pour ceux qui ne bénéficient pas de l’aide au paiement d’une complémentaire santé, les cotisations représentent plus de 10% de leurs revenus. D’autres catégories, comme les jeunes sans emploi, connaissent des situations dramatiques. Des dispositifs d’aides existent, mais trop complexes. On compte pas moins de huit dispositifs pour un total de 5,6 milliards d’euros d’aide et ceux-ci ne bénéficient pas toujours aux plus démunis. Ils reposent, en outre, sur une segmentation de la population selon une logique de statuts, qui contrevient au principe mutualiste. Résultat : selon l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (I.R.D.E.S.), la part que la couverture santé représente dans les revenus des ménages varie de 3% pour les plus aisés à 10% pour les plus pauvres. Enfin, parmi les ménages les plus pauvres, 12% des personnes n’ont pas de complémentaire contre 3% parmi ceux les plus aisés.
Comment rétablir l’équité ? Des communes comme celles de Caumont-sur-Durance dans le Var ou la ville de Bayonne ont mis en place des mutuelles communales. Dans certains cas, elles font appel à des associations telles Actiom (Actions de mutualisation pour l’amélioration du pouvoir d’achat) qui font le lien avec la mutuelle et négocient des tarifs avantageux pour leurs adhérents. Quoiqu’intéressantes, ces initiatives ne suffiront pas à combler le fossé entre assurés. Pour beaucoup, la loi A.N.I doit être une étape vers une reconfiguration de la prise en charge avec d’un côté, les dépenses remboursées par l’assureur public et de l’autre, les dépenses couvertes par le secteur privé.
Pour rendre le financement plus efficace, plus simple et plus juste, deux pistes sont à l’étude : la création d’un crédit d’impôt santé où l’aide n’est plus attribuée en fonction du statut mais des revenus ; la mise en place d’un chèque santé, financé par l’Etat ou l’employeur, qui permet à l’assuré de choisir sa mutuelle.
Voilà un dossier dont les candidats à la candidature présidentielle devraient s’emparer ! Un dossier dans lequel se conjuguent de grands principes comme l’égalité des droits, la dignité humaine, la solidarité entre les générations, et qui concerne directement le pouvoir d’achat des Français.

