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Publié le 7 mars 2017

Osons le dire, les hommes politiques à haute responsabilité ne sont pas assez rémunérés

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Publié le 04/03/2017

1Rémunération des élus: tous hypocrites?

Comme le veut le dicton: si la démocratie n’a pas de prix, elle a un coût. Après avoir clarifié les règles de financement des partis politiques, la démocratie française se heurte à un nouveau défi: la rémunération de ses représentants. Le malaise vient du fait que ceux censés trancher cette question en sont les principaux bénéficiaires. Ils agissent sous le regard vigilant de l’électeur-citoyen-contribuable dont le premier réflexe sera de comparer le « salaire » de son élu au sien. Pour certains, la somme paraîtra astronomique, pour d’autres, normale. S’y ajoute une dimension symbolique: l’engagement au service de l’intérêt général sous-entend dans l’opinion, un certain désintéressement. Oui, mais jusqu’où?

Difficile en ces temps de crise de faire pleurer l’électeur sur la rémunération de ceux qui le gouvernent. Toutefois pour juger d’une rémunération, il faut savoir ce qu’elle recouvre, soit pour un parlementaire: le travail en séance et en commission, la tenue de permanences hebdomadaires dans sa circonscription, sa présence à une kyrielle d’évènements locaux. Des évènements qui se tiennent le week-end et dont les participants ne comprendraient pas que « leur » parlementaire préfère passer du temps en famille plutôt que d’y assister. Rappelons enfin qu’un élu peut être « remercié » sans préavis au bout de cinq, dix ou quinze ans. Et que dire d’un ministre, dont la mission est aussi intense que courte et dont le niveau de responsabilités est souvent très élevé?

Avouons-le: les hommes politiques à haute responsabilité ne sont pas assez rémunérés, surtout si l’on compare leur situation à celles de certaines professions libérales, certains dirigeants d’entreprises, voire même certains hauts fonctionnaires. D’où la création de subterfuges pour compenser: emploi discrétionnaire de l’enveloppe pour rémunérer des collaborateurs, indemnité représentative de frais de mandat, déplacements gratuits ou à prix très réduits, avantages en nature, cumul des mandats, etc. Dans certains cas, l’embauche d’un proche s’apparente à un complément de rémunération. Peu connues, puis tolérées, puis critiquables, avant de devenir intolérables, ces pratiques posent deux questions: comment rémunérer les élus et plus particulièrement les parlementaires de manière décente (c’est-à-dire à la hauteur de leurs responsabilités, de leur temps effectif de travail et de l’instabilité de leur fonction)? Et comment réglementer le statut de leurs collaborateurs?

La réponse à la première est en théorie assez simple. Il suffit d’additionner tous les avantages, les supprimer, et les compenser par une indemnité unique soumise à l’impôt sur le revenu. Dans ce système, le parlementaire obtiendrait le remboursement de ses frais de mandat sur présentation des justificatifs. En contrepartie, la loi mettrait fin à toute forme de cumul de mandats et d’activités, tout en réduisant le nombre d’élus nationaux. En pratique, cette remise à plat – puisqu’après tout, il ne s’agit que de cela- suppose un courage politique proche de l’héroïsme. C’est pourtant à ce prix que les fonctions électives continueront d’attirer des profils de haut niveau, aujourd’hui tentés par des carrières moins risquées, plus discrètes et, en général, plus rémunératrices.

Concernant le statut des collaborateurs, rappelons que ces derniers lient leur destin à celui de leur employeur. Ils « n’existent » que par lui et disparaissent avec lui. Leurs fonctions supposent une entière confiance. Des raisons qui militent pour laisser le parlementaire libre de les choisir, fussent-ils de sa famille! Un principe de liberté qui n’empêche pas, bien sûr, de contrôler la réalité du travail accompli et de fixer un plafond de rémunération. D’autres systèmes sont possibles. Au Parlement européen, les assistants bénéficient d’un statut de fonctionnaire. Leur rémunération obéit à un barème. Dans les collectivités locales, les présidents d’exécutifs recrutent leurs collaborateurs dans un corps de fonctionnaires. Nombreux sont les attachés parlementaires qui réclament la création d’un statut, ne serait-ce que pour obtenir une meilleure reconnaissance de leur travail.

Des réformes qui réclament du courage. Celui de dire la vérité et celui de l’entendre.

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