Publié le 24/04/2018
Autrefois l’apanage d’une minorité sensibilisée, le bio se démocratise. Cette forme d’agriculture, dont le principe de base est l’absence d’engrais, de pesticides et d’OGM, est en plein essor.
Le marché des produits bio a bondi de 16 % entre 2016 et 2017, au point de devenir le facteur majeur de croissance du secteur de l’alimentation en France. Avec 6,5 % de sa surface agricole cultivée en bio, le pays se place au 3e rang européen. Mais au-delà d’un mode de production plus respectueux de l’environnement, ce que l’on nomme la bio porte un véritable engagement redéfinissant autant le modèle actuel d’agriculture productiviste que la relation de l’homme à la nature. Et c’est avec la bio que l’on peut envisager aujourd’hui de répondre à l’urgence environnementale.
L’agriculture conventionnelle a, en effet, montré ses limites. Les pesticides sont à la fois un désastre pour les rivières et les sols, et un problème de santé publique. Ils sont à l’origine de nombreuses maladies reconnues comme professionnelles chez les agriculteurs. La France en est d’ailleurs le premier consommateur en Europe et le troisième dans le monde : 93 % de ses cours d’eau en seraient pollués. Il y a donc urgence à agir, et c’est justement la santé qui se trouve en tête des motivations des Français, de plus en plus nombreux à faire confiance au bio, qui leur garantit contrôle, origine et traçabilité. Plus largement, la bio permet aussi de répondre au défi climatique. Non seulement elle contribue à lutter contre le phénomène en s’éloignant du schéma d’agriculture intensive énergivore et en favorisant les circuits courts, mais, par la diversification des cultures, elle permet aussi de s’adapter aux changements climatiques eux-mêmes.
En plus, si l’agriculture biologique est bonne pour la nature, elle l’est aussi pour l’homme. Les agriculteurs sont aujourd’hui en grande difficulté, la chute des prix de vente rogne leur marge et ne leur permet parfois même plus de vivre de leur métier. Passer à la bio, c’est souvent la promesse de meilleures performances économiques, pour les agriculteurs eux-mêmes. La bio offre une création d’emplois bien supérieure à celle de l’agriculture conventionnelle et, en relocalisant la production, permet de maintenir l’activité dans les territoires. Finalement, elle est un art de vivre, une volonté pour ceux qui la portent de renouer le lien avec la nature et de donner du sens à la consommation et aux échanges. Elle nécessite donc de repenser ses habitudes et son mode de vie : inutile d’acheter un produit bio qui provient de l’autre bout de la planète.
Mais viser le « tout bio » est-il raisonnable ? La bio peut-elle, à terme, nourrir la France et la planète ? Les experts s’accordent à dire que cette situation est envisageable, à condition, entre autres, de réduire le gaspillage et la consommation de produits d’origine animale. Car contrairement à une idée reçue, les rendements de l’agriculture biologique sont supérieurs à ceux de l’agriculture traditionnelle. D’ailleurs, aux quatre coins du monde, la bio avance. Le Bhoutan, petit pays himalayen, s’est fixé un objectif de tout bio à l’horizon 2025. Au Burkina Faso, l’agro-écologie permet de lutter contre la désertification et promet de mener le pays à l’autonomie alimentaire.
Soutenir la bio est donc une priorité. Nul doute que les pays les moins avancés auront besoin de l’aide nécessaire pour ne pas reproduire nos choix agricoles. A une échelle plus locale, le gouvernement français promet des avancées sur la bio : élimination progressive des pesticides, investissement et recherche, tandis que l’Union européenne prépare aussi une refonte ambitieuse du règlement sur la production bio. A côté de ces évolutions institutionnelles, il faudra aussi compter avec l’évolution des mentalités.