La nouvelle loi de bioéthique va être adoptée dans le contexte d’une évolution toujours plus rapide des techniques de procréation. Alors que celles-ci ne cessent de se perfectionner et de se développer, portées par le progrès scientifique et l’évolution des modes de vie, le politique tente tant bien que mal de garder la main, afin d’éviter que la dystopie d’une « procréation sans sexe » ne devienne réalité. La France défend depuis toujours une approche originale, fondée sur le respect de la dignité humaine, entendue comme l’impossibilité de céder son corps à d’autres ou d’en faire une marchandise. Appuyé par un Comité consultatif national d’éthique, le législateur révise les lois de bioéthique à intervalle régulier, désormais tous les cinq ans, afin d’accompagner les avancées de la science dans le respect de ce principe.
Pour diverses raisons, ce modèle se trouve aujourd’hui sous pression. Sur le plan interne, l’évolution rapide et profonde des mœurs va dans le sens d’un recours accru aux techniques artificielles de procréation. Sur le plan externe, la France est confrontée à la concurrence de modèles beaucoup moins régulés, vers lesquels ses ressortissants peuvent librement se tourner. Les banques de sperme danoises peuvent par exemple fournir à qui veut, et à titre onéreux, des échantillons soigneusement sélectionnés. L’interdiction de la GPA est affaiblie par l’obligation de faire apparaître la mère d’intention lors de la retranscription de l’état civil d’un enfant né par ce biais à l’étranger. Face à cela, les attitudes varient, entre résignation, obstination et pragmatisme. Ne vaudrait-il pas mieux autoriser certaines pratiques en France pour mieux les réguler et éviter les abus ? Sans doute plus réaliste, cette position présente néanmoins l’inconvénient d’acter l’impossibilité de la collectivité à se doter de ses propres règles et à poser des garde-fous. Un problème lorsque l’on observe certains développements, particulièrement inquiétants. C’est le cas de la généralisation du diagnostic pré-implantatoire (DPI), un outil très encadré en France, où il ne peut être utilisé que dans des cas exceptionnels de risque de transmission d’une maladie rare des parents à l’enfant. Certains voudraient le voir étendu à davantage de maladies, posant alors la question vertigineuse de la légitimité des individus frappés de pathologies lourdes à naître et à vivre. Nul doute que sur ce point, et bien d’autres, le politique n’a pas encore dit son dernier mot.